Qui a dit que le groupe n’avait pas d’intelligence ? Aujourd’hui, les possesseurs d’ordinateurs individuels (PC) réinventent le collectivisme, dans l’intérêt bien compris de chacun : c’est l’informatique coopérative. L’avènement d’Internet permet d’interconnecter des centaines de millions d’ordinateurs à travers le monde, capables de partager des ressources de multiples natures.
- 1. Technologies de réseaux : le carré magique de Metcalfe
Robert Metcalfe, inventeur du protocole informatique Ethernet et fondateur de la société 3COM, a formulé une loi empirique permettant de mesurer l’utilité d’un réseau.
Utilité du réseau = k * N²
où N désigne le nombre de nœuds du réseau et k un facteur multiplicatif.
Autrement dit, l’utilité d’un réseau est proportionnelle au carré du nombre des points qu’il relie. Prenons le cas du téléphone. S’il n’y a que deux utilisateurs, on peut parler de réseau, mais sa valeur est très faible. Si tous les habitants d’une petite ville sont reliés au réseau téléphonique, sa valeur devient déjà beaucoup plus importante. Aujourd’hui que tous les habitants des pays développés sont équipés, la valeur du réseau téléphonique mondial est considérable, contribuant à créer un « village mondial ».
- 2. Internet : la révolution avant l’heure
Et l’Internet dans tout ça ? En 1993, 2,5 millions d’ordinateurs y étaient reliés. En 1997, ils étaient 25 millions. On peut donc dire en première approximation que l’utilité d’Internet a été multipliée par 100 en quatre ans. C’est vrai qu’Internet a changé notre vie, que ce soit au bureau ou à la maison. Le courrier électronique est exemplaire à cet égard. Le phénomène Internet a modifié les mentalités, au point qu’on a pu croire à une révolution. Cette croyance est allée jusqu’à s’emparer des milieux financiers, créant la « bulle Internet ».
Et puis la bulle a éclaté en l’an 2000.
Pourquoi ? Parce que si Internet avait profondément remanié les cartes du jeu économique et social, il n’avait pas encore atteint à cette époque tout son potentiel. La loi de Metcalfe ne s’appliquait à lui qu’imparfaitement. En effet, si les ordinateurs connectés au « Web » formaient bien un réseau planétaire, l’architecture restait centralisée, les flux de données restant dominés par les échanges entre les sites (parfois regroupés en portails) et les internautes.
- 3. L’informatique coopérative : le (vrai) grand bond en avant
La révolution attendue est peut-être en train de se produire avec le développement de l’informatique coopérative. Le principe est simple : en bénéficiant de la généralisation de l’accès à Internet, il s’agit de mettre en commun des ressources entre les ordinateurs du réseau. Le phénomène a pris une ampleur particulière depuis deux ans, avec l’essor du haut débit et des connexions permanentes. On arrive ainsi à un modèle dans lequel chaque ordinateur peut réellement collaborer avec tous les autres, donnant tout son sens à la loi de Metcalfe.
- 4. Les quatre stades de l’informatique coopérative
Quatre types d’application sont apparus qui continuent à coexister. Chacun d’entre eux marque un pas en direction de l’intelligence distribuée, orientation que semble prendre l’informatique coopérative.
C’est sans conteste Napster qui a fait connaître cette application au grand public. Le site permettait aux internautes de mettre en commun leurs fichiers musicaux, de les rechercher à l’aide d’un moteur, et de les télécharger. Néanmoins, le système restait centralisé, avec un serveur chargé de mettre en relation le PC demandeur avec le PC possédant la ressource. C’est d’ailleurs cette caractéristique qui a été utilisée par les grandes maisons de disque pour attaquer Napster devant la Justice, l’obligeant finalement à fermer (*). D’autres systèmes véritablement peer to peer sont apparus par la suite, sans cette limitation. Il s’agit de réseaux sans serveur centralisé. L’utilisateur recherchant un fichier (chanson, vidéo, logiciel…) envoie sa requête qui est acheminée de proche en proche par les nœuds du réseau. Se constitue ainsi une chaîne ad hoc entre le PC demandeur et le PC possédant la ressource (s’il existe) permettant le transfert du fichier. Parmi les logiciels peer to peer les plus utilisés, on peut citer Limewire, Kazaa, Overnet…Ils sont beaucoup plus difficiles à contrer d’un point de vue juridique, car leurs promoteurs se contentent de mettre à disposition un protocole d’échange de fichiers et ils ne peuvent pas, en principe, être tenus responsables de l’usage qu’en font les personnes. Au-delà de cette querelle, les systèmes peer to peer sont une mine d’informations, permettant à leurs utilisateurs de trouver des documents rares qu’ils n’auraient jamais pu se procurer autrement. Continue reading Informatique coopérative : la Communauté du réseau